" Je sais. Je sais pourquoi. Cela pourrait se résumer en trois ou quatre mots: regarder l'instant du crépuscule. Faut-il expliquer, justifier, se perdre en paroles là où seuls comptent les actes ? Regarder l'instant du crépuscule. Cela suffit. Les jambes qui tournent sur la Terre qui tourne, c'est la vie qui repousse ses limites, qui agrandit ses frontières. Le temps perdu à rouler dans le vent, sous la pluie ou contre la montre, c'est du temps retrouvé pour affronter plus tard les jours gris qu'on tapisse avec ses souvenirs, tant mieux s'ils furent heureux, et s'ils ne le sont pas, au moins qu'ils soient riches en aventures. "
Petit éloge de la bicyclette - Éric Fottorino - Editions Gallimard, 2007.
Du 29 novembre 2012 au 4 mars 2013, nous allons parcourir à vélo, à pied et en bateau la Patagonie chilienne et argentine de Puerto Montt à Ushuaïa via la Carretera austral et la route 40 puis remonter vers le nord par l'Argentine en traversant les parcs nationaux Torres del Paine, Fitz Roy, Los Glaciares, Périto Moreno, Rio Simpson, Los Alerces pour finir par l'ascension du volcan Osorno. Notre équipe est composée d'Emily jeune anglaise et deux retraités Jacques et Gilles.
dimanche 16 février 2020
Enivrez-vous
Il faut être toujours ivre. Tout est là : c'est l'unique question. Pour ne pas sentir l'horrible fardeau du Temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve.
Mais de quoi ? De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. Mais enivrez-vous.
Et si quelquefois, sur les marches d'un palais, sur l'herbe verte d'un fossé, dans la solitude morne de votre chambre, vous vous réveillez, l'ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à l'oiseau, à l'horloge, à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est ; et le vent, la vague, l'étoile, l'oiseau, l'horloge, vous répondront : « Il est l'heure de s'enivrer ! Pour n'être pas les esclaves martyrisés du Temps, enivrez-vous ; enivrez-vous sans cesse ! De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. »
Baudelaire, Le Spleen de Paris, XXXIII
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